La légende s’éteint : Clark Olofsson, entre cinéma et cellule
- Léa SANTELLI
- 3 juil.
- 4 min de lecture
Clark Olofsson, le braqueur suédois tristement célèbre pour son rôle dans la prise d’otages de 1973 à la Kreditbanken de Stockholm, est décédé à l’âge de 78 ans dans un hôpital suédois, a annoncé sa famille ce jeudi 26 juin 2025. Il souffrait d’une longue maladie. Cet événement, devenu mondialement célèbre pour avoir donné naissance à l’expression "syndrome de Stockholm", a marqué l’histoire du crime — et inspiré la série "Clark" sur Netflix, qui a largement romancé la vie du criminel. Entre légende flamboyante et réalité beaucoup plus trouble, la fiction a contribué à faire de ce multirécidiviste un personnage pop, là où les faits réels racontent surtout une trajectoire violente, marquée par les prisons, les évasions et le trafic de drogue.

Clark Oderth Olofsson (1er février 1947 – 24 juin 2025) était un criminel suédois devenu célèbre pour une série de crimes graves, dont une tentative de meurtre, des agressions, des braquages à main armée et du trafic de drogue.
Ayant passé plus de la moitié de sa vie derrière les barreaux, Olofsson a été surnommé « le premier gangster pop de Suède ». Malgré la gravité de ses actes, il a longtemps bénéficié d’une image médiatique indulgente, suscitant davantage de fascination que de peur. À une époque, un sondage Gallup réalisé aux États-Unis le plaçait parmi les hommes les plus influents de Suède.
Après avoir purgé un peu plus de dix ans de prison pour sa dernière condamnation, principalement liée au trafic de drogue, Olofsson a retrouvé la liberté en juillet 2018.
Une scène de braquage qui bascule dans l’histoire
Le 23 août 1973, Janne Olsson, armé d’une mitraillette et sous l’emprise de stupéfiants, fait irruption dans la Kreditbanken, dans le centre de Stockholm. Il prend quatre employés en otage et exige que son ancien complice Clark Olofsson, alors en prison pour braquage, soit amené sur place. Le gouvernement suédois accède à sa demande, espérant calmer la situation.
L’effet est immédiat. Olsson se montre plus coopératif, et certains otages, notamment Kristin Enmark, développent rapidement une sympathie inattendue pour leurs ravisseurs. "Je fais entièrement confiance à Clark et au voleur", dira-t-elle lors d’un appel téléphonique avec le Premier ministre Olof Palme. "Ils ont été très sympas. Ce qui me fait peur, c’est la police."
La naissance d'un terme mondialement connu "le Syndrome de Stockholm"
Pendant six jours, le public assiste en direct à cette prise d’otages sans précédent. Lors de la libération des otages, obtenue après une intervention policière au gaz lacrymogène par le toit de la banque, aucun otage ne témoigne contre les ravisseurs. Ce comportement interroge l’opinion publique.
Le phénomène est baptisé par le criminologue Nils Bejerot : "syndrome de Stockholm". Il décrit la réaction psychologique paradoxale d’une personne retenue captive qui, dans un contexte de menace, développe de l’attachement, voire de la loyauté, envers son agresseur. Depuis, des experts continuent de débattre de sa légitimité comme diagnostic clinique, mais l’expression est entrée dans le langage courant.
De l’homme à l’icône : comment Netflix a réécrit l’histoire de Clark Olofsson
Clark (Netflix, 2022) est une série biographique suédoise signée Jonas Åkerlund, avec Bill Skarsgård dans la peau du célèbre braqueur Clark Olofsson. Entre humour noir, mise en scène débridée et récit fragmenté, elle dresse le portrait d’un criminel devenu figure médiatique — mais jusqu’où la fiction s’écarte-t-elle de la réalité ? J'ai effectué une comparaison entre fiction et réalité. Voici les principales différences :
Dans la série, l’enfance d’Olofsson est peinte comme chaotique : abandons, fugues, instabilité. La réalité est en partie similaire, mais moins dramatisée. Né en 1947 à Trollhättan, Clark a grandi dans un foyer marqué par la maladie mentale de sa mère. Placé en famille d’accueil, il s’engage à 14 ans dans une école de marine avant de sombrer dans la petite délinquance.
Des évasions amplifiées
La série affirme qu’Olofsson s’est évadé 17 fois, enchaînant les cavales spectaculaires. En réalité, si les évasions sont nombreuses, leur nombre exact reste flou. La série grossit délibérément ce trait pour souligner le caractère insaisissable du personnage.
Une vie amoureuse romancée
Dans Clark, le criminel est dépeint comme un séducteur invétéré, multipliant les conquêtes et les histoires d’amour intenses. La réalité est plus sobre : marié à Marijke dans les années 1970, il est père de trois enfants. Si ses liaisons ont pu faire parler, la série dramatise clairement cette facette de sa vie.
Le braquage de Norrmalmstorg : fiction fidèle mais embellie
L’épisode central du braquage de Norrmalmstorg, en 1973, est bien restitué dans la série. Clark y rejoint Jan-Erik Olsson à la demande de ce dernier, au cœur d’une prise d’otages qui durera six jours. L’expression "syndrome de Stockholm" naît de cet épisode. Cependant, certaines scènes marquantes de la série, comme les moments festifs entre otages et ravisseurs, sont des inventions pures sans fondement historique.
Le "syndrome de Stockholm", un concept contesté
La série suggère que les otages développent un attachement sincère envers leurs ravisseurs. Dans les faits, l’une des otages, Kristin Enmark, a toujours rejeté ce concept, expliquant qu’elle cherchait simplement à survivre.
Crimes postérieurs largement ignorés
La série s’arrête à la fin des années 1970, passant sous silence les épisodes les plus lourds de la vie d’Olofsson. Dans les années 1990, il est impliqué dans un braquage d’art (Moderna Museet) à Stockholm, condamné pour trafic de drogue en 1998 au Danemark (14 ans), puis de nouveau incarcéré en Suède en 2008. Il ne sortira qu’en 2018.
Un ton visuel entre clip et bande dessinée
Clark est une adaptation hautement stylisée — réussie pour son ambiance et la performance de Bill Skarsgård — mais qui prend des libertés narratives, romanesques ou symboliques. Pour une version plus précise de la vie de Clark Olofsson, ses biographies, documentaires ou archives judiciaires offrent un tableau plus factuel.
Je vous recommande néanmoins la série pour une première approche du célèbre braqueur suédois, elle est assez courte et agréable à regarder !
Super intéressant !!